Ascension du Grand Paradis d’un Chulli
Christopher est un Chulli du magasin d’Antibes. Et comme beaucoup de Chulli.e.s, il aime profondément la montagne et y vivre de belles aventures outdoor. Sa traversée du Grand Paradis, il nous la raconte en mots et en images. Bonne lecture.
« Premier parc naturel d’Italie et d’Europe, le Parc National du Grand Paradis délimite un haut massif sillonné de vallées profondes. Créé en 1922 à l’initiative du roi Victor Emmanuel II pour la défense du bouquetin, le Grand paradis est le point culminant à 4061m, c’est le seul sommet dépassant les 4000m dans le parc. C’est un sommet réputé facile du fait de l’absence de difficultés techniques, il faut cependant rester attentif aux conditions et avoir le pied sûr pour accéder à la plateforme sommitale qui nécessite le franchissement d’un pas aérien.
Avec deux compagnons nous décidons de nous attaquer à son ascension au mois d’Avril. La destination de ce long Week end était encore incertaine au vu de la météo, notamment de l’autre côté à Chamonix. Mais une fenêtre météo paraissait bonne à prendre dans le val d’Aoste. Nous avons donc pour but de gravir le Grand paradis (4061m) et la Tresenta (3609m) qui est un voisin direct. Ces deux sommets m’attirent car ils peuvent se faire « presque » intégralement les skis aux pieds.
Premier jour :
Nous sommes partis en milieu de matinée pour effectuer un peu plus de 5h de route jusqu’à « Pont » au fond de la vallée sauvage de Valsavarenche où se situe le départ pour monter au refuge Victor Emmanuel II. Une fois arrivé on s’équipe tranquillement on chausse les skis et on part en direction du refuge pour y passer la soirée. La montée au refuge est assez longue car il faut faire la trace sous une chaleur de plomb, je crois que je n’ai jamais eu aussi chaud en montagne. Le cheminement est évident car parsemé d’une multitude de balises. Une fois arrivé au refuge, nous trouvons notre chambre et nous installons sur la terrasse avec une bière, pas de téléphone ici, on discute de longues heures et on en profite pour étudier l’itinéraire du lendemain pour atteindre le sommet de la Tresenta. Après une bonne soupe, et une polenta digne d’un refuge italien on pars se coucher.
Deuxième jour :
Aujourd’hui on n’est pas pressés, au programme un peu d’acclimatation et manipulations de cordes. On se lève tranquillement et après un petit déj on se retrouve dehors skis aux pieds aux alentours des 9h. La météo est fidèle aux prévisions, qui indique un créneau de beau temps pendant 2 jours. On se retrouve rapidement seul sur le glacier de Montcorvé en direction du col du Grand Paradis. Après avoir remonter ce glacier sur pratiquement 2km on oblique ensuite Sud-Ouest pour remonter l’éperon Nord-Ouest de la Tresenta. Il s’agit d’une pente assez raide (40°) que l’on remonte skis aux pieds. Malheureusement ça ne passe pas jusqu’au sommet, le sommet est trop dégarni, on sort les crampons et on termine à travers bloc rocheux et neige jusqu’à la croix sommitale.
On en profite pour manger un bout mais le soleil tape et on préfère redescendre assez vite pour limiter l’exposition aux pentes surplombant le glacier qui se réchauffe de minutes en minutes. La descente est d’ailleurs rythmée par le bruit de coulées plus ou moins grosses. Une fois redescendu, on sort les cordes et on travaille les manipulations et mises en place de mouflages et sauvetage en crevasses. Retour refuge, ce soir on se couche tôt pour être en forme demain.
Troisième jour :
C’est le jour J, étant donné la fréquentation de l’itinéraire on décide de partir un peu plus tard que les autres cordées. Après un petit déj, nous voilà donc partis pour le Grand Paradis. Quel bonheur d’être ici, je me sens en forme après 2 nuits passés à 2732m. On rattrape assez rapidement plusieurs cordées mais on se fera tout de même doublés par des Italiens en tenue de course effectuant l’aller-retour depuis la vallée comme entrainement hebdomadaire. Le cheminement est assez long, on fait une pause vers 3700m juste avant un dernier raidillon qui fais mal aux jambes à cette altitude.
Une fois arrivé à la rimaye, on se rend compte une nouvelle fois que le glacier suspendu soufflé par le vent nécessite les crampons, on laisse alors les skis sous la rimaye, on s’encorde et on s’attaque aux 250 derniers mètres, crampons aux pieds. On est tous en forme, on se surprend à accélérer mais l’altitude nous ramène vite à la raison, on ne pourra pas courir jusqu’en haut !
Une fois arrivé sur l’arrête le vent se lève brutalement, on patiente sur un rocher le temps qu’une cordée devant nous libère le passage. Quelques minutes après on s’attaque à notre tour à la vire nous séparant de la vierge. C’est un passage très esthétique et aérien.
On croise une cordée au sommet qui ne tarde pas à redescendre, nous voilà seul au sommet du Grand Paradis, quelle chance ! On est au-dessus de la mer de nuages.
Petite halte auprès de la vierge puis nous tirons un petit rappel pour gagner du temps et reprendre pied sur le glacier en contrebas. On retrouve nos skis, on chausse et on redescend les 1300m qui nous séparent du refuge. C’est un très bon moment de ski, avec en fond les alpes. La neige est excellente, c’est quand même plus agréable que de marcher !Une fois arrivé au refuge les émotions de la journée retombent, l’apéro s’éternise, on est heureux d’être là.
Quatrième jour :
C’est le dernier ! Aujourd’hui le temps à tourner, on prend notre petit déj sur la terrasse intérieure panoramique avec vue surplombant la vallée mais contrairement aux deux derniers jours on ne voit rien, plein brouillard et la neige tombe dehors. On se réjouis d’avoir profiter pleinement de la fenêtre météo. Il est temps de redescendre avec prudence car on ne voit absolument rien, à deux reprises on se servira d’une cordelette pour juger le terrain. Une fois arrivé au niveau de la forêt, la visibilité s’améliore et on profite des derniers virages skis au pied jusqu’à la voiture.
Nous voilà déjà sur la route en chemin pour la maison, demain c’est boulot ! On se surprend à parler de nos futures courses et nos futurs projets. Si le voyage retour ne consiste qu’en 5h de trajet sur une autoroute, à l’intérieur, le voyage retour n’est jamais aussi facile.
Le Grand Paradis est un sommet que je recommande fortement pour une première expérience à cette altitude. Il suffit d’être conscient que vous partagerez l’itinéraire avec plusieurs cordées pour faire abstraction et tirer pleinement profit de cette expérience. Etant donné l’absence de difficultés techniques sur l’itinéraire, je conseil de faire cette ascension en ski de rando, quand les conditions le permettent vous pourrez laisser les skis juste sous le sommet et vous laissez glisser ensuite jusque dans la vallée, soit un peu plus de 2000m de dénivelé. »
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