Grimpe dans les Yosémites
Thomas Auvaro, grimpeur passionné des Alpes-Maritimes est parti en mai dernier avec ses amis dans les Yosémites pour se frotter aux voies mythiques des Etats-Unis. Il vous raconte ses quelques jours d’aventure qui lui laisseront des souvenirs indélébiles et des photos à couper le souffle !
« En mai dernier avec Thomas, Enzo, Fred et moi, nous avons été nous frotter aux mythiques parois du Yosemite. Cette vallée est la capitale mondiale du bigwall, réputée pour ses fissures et son magnifique granit. Toutes ses faces sont chargées d’histoires. Depuis la fin des années 50, les grimpeurs du monde entier viennent repousser les limites de l’escalade dans ce lieu magique. Le film « Valley Uprising » retrace à merveille l’histoire de l’escalade dans la vallée.
Pour prendre nos marques, nous commençons par grimper quelques voies en vallée.
Tout d’abord « Border Country » (5.12, 7b, 12lgr) à Middle Cathedral. Une super voie majoritairement en dalle, qui nous permet de tester les limites de l’adhérence de nos chaussons sur ce granit si particulier, souvent très lisse est glissant.
Le lendemain c’est parti pour Fifi Butress. Avec Fred, nous choisissons « Voyager » (5.11C, 7a, 10 lgr) alors que Enzo et Thomas grimpent à notre droite « Final frontier ». Pour cette voie l’escalade en fissure est de mise. Les spits se font beaucoup plus rares et nous avons l’occasion de réviser nos techniques de verrous en fissures.
Le troisième jour, une équipe part dans la « Leaning tower », avec Fred nous choisissons de grimper « Beggar buttress » (5.11C, 7a, 8 lgr). Cette fois-ci c’est une voie plus ancienne que nous avons choisie, aucun spit en place, de la superbe grimpe en fissure et des cotations d’époque, bien serrées !
Après ces quelques journées d’acclimatation au style, nous sommes impatients d’aller nous confronter à de grandes parois. Nous partons poser nos tentes quelques jours à Little Yosemite valley, au pied du Half Dome.
Nous sommes subjugués par la beauté de la face sud du Half Dome.
Nous décidons de grimper « Growing up ». (5.13a, 7c+, 800m). La première moitié de la voie remonte un système de magnifiques dièdres fissurés.
Puis l’escalade change radicalement de style, les 400 derniers mètres sont constitués de magnifiques dalles sculptées.
En fin d’après-midi le ciel se charge de nuages noirs et menaçants, l’orage n’est pas loin, nous prenons même quelques grêlons. Après 23 longueurs nous atteignons le sommet du Half Dome, heureux d’avoir pu grimper une aussi belle voie. Sans doute la plus belle de notre voyage.
Après une journée de repos nous décidons rendre visite à la classique « Regular » (5.12c, 7b+ A0, 800 m) en face nord du Half Dome. Une voie historique ouverte en 1957 par le légendaire Royal Robbins.
Certaines cordées prennent le temps et gravissent la voie en 2 jours, nous choisissons de partir plus légers pour sortir la voie dans la journée.
L’itinéraire est astucieux (vires, traversées, pendules) mais l’escalade est moins esthétique que dans la face sud de Half Dome. Nous sommes quand même bluffés par l’audace des ouvreurs, qui avec le matériel de l’époque ont réussi à gravir cette face extrêmement raide et soutenue.
A cet endroit, historiquement l’itinéraire traversait sur une vire, mais de l’éboulement d’une gigantesque écaille en 2015 oblige aujourd’hui à une deuxième longueur d’escalade artificielle cotée A0 sur de mauvaises puces de 6mm.
Après encore une longue journée d‘escalade nous atteignons le sommet, la lumière est superbe.
De retour en vallée, nous choisissions d’aller grimper un autre bigwall de la vallée, le Mont Watkins. Ce sommet est reculé, est très peu fréquenté. Il faut 3h pour rejoindre le bivouac au pied de la face. Cette approche est splendide et sauvage, pas de sentier juste quelques cairns. Nous avons vraiment l’impression d’être sur le territoire des ours !
Fred et Thomas choisissent « South face » (5.13B ou 5.9 A2, 800m) alors qu’avec Enzo nous grimpons « Soul Garden » (5.13b, 8a, 800m). Dans cette voie pas de réversible pour moi, je grimpe en tête les longueurs les plus faciles alors qu’Enzo se défoule dans les longueurs « crux ».
Nous sortons au sommet juste avant la nuit. S’en suit une longue descente de 4 heures, de nuit et dans une forêt dense. Après les 800 mètres de grimpe, le retour nous paraît interminable.
Après quelques jours de repos les prévisions météo nous permettent d’envisager de grimper la mythique face d’El capitan.
C’est la face la plus connue de la vallée, la plus haute, la plus esthétique, la plus raide… beaucoup d’adjectifs pourraient s’ajouter à cette liste !
La mythique voie du « Nose » est comme d’habitude surpeuplée. Nous préférons choisir une ligne avec de belles longueurs de libre. Nous jetons notre dévolu sur « Free rider » (5.12d, 7c+,1100m).
Le premier jour nous commençons à grimper le « Freeblast » vers 15h pour éviter les grosses chaleurs. A 18h nous sommes confortablement installés au premier bivouac.
Le lendemain les choses sérieuses commencent. Nous grimpons 12 longueurs soutenues. L’escalade est magnifique et souvent très physique : Fissures raides, cheminées larges, « offwidth » sanglants (fissures dans lesquelles les mains ne se coincent pas et où le corps de peut pas entrer en opposition, une horreur !). Avec Thomas nous grimpons en réversible pour se répartir la tâche. Après sa longueur en tête, le leader doit encore hisser les 2 sacs de 70 litres jusqu’au relais ce qui est encore plus physique que la grimpe elle même !
Nous atteignons le bivouac « The block » à la nuit, bien fatigués !
Nous profitons quand même de ce moment, ce n’est pas tous les jours que l’on peut dormir sous les étoiles dans El cap avec 3 copains !
Au réveil la météo est bien plus médiocre que ce qui était prévu. Nous nous levons dans un épais brouillard, il fait froid et humide.
Nous hésitons à nous rationner pour patienter une journée et grimper le lendemain au retour du beau temps, mais vers 11H le ciel se dégage légèrement et la tentation est trop forte. Malgré le léger crachin nous commençons à grimper. Les longueurs sont de plus en plus raides, l’ambiance est démoniaque !
Nous sortons à la limite de la nuit au sommet, nous avons mal partout mais nous sommes heureux. Nous trouvons un super bivouac, et profitons d’une nuit réparatrice.
Le lendemain matin il fait grand beau, Enzo décide de retenter la seule longueur de la voie qu’il n’avait pas enchaînée en libre.
Thomas et moi l’accompagnons. Pas facile de se pendre à 1000m du sol de bon matin !
Rapidement la bruine fait son retour mais Enzo reste imperturbable, il enchaîne la mythique fissure du « Salathé wall » 60 mètres cotée 8b et s’accorde donc l’ascension en libre d’El capitan, impressionnant !
Pour finir notre périple nous profitons d’une belle journée pour grimper à Tuolumne Meadows. »
Cette équipe d’amis grimpeurs nous a impressionné ! Et vous ? Une petite envie d’escalade dans les Yosémites ? N’hésitez pas à partager vos aventures, en tant qu’amateurs ou non, nous les publierons sur le Blog des Chullis ! Envoyez-nous vos récits sur [email protected].
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